Monica Gomes
Dessin de Karl Nawrot pour la saison 2017.

Monica Gomes

Le théâtre de la Balsamine se définit comme une maison de création contemporaine. Elle encourage la cohabitation et le décloisonnement de différentes disciplines. En proposant régulièrement aux publics des ateliers gratuits et en adoptant une politique tarifaire accessible, elle rend visible les créations présentées et soutient des objets scéniques particuliers. Monica et Fabien furent co-directeur.ice.s pendant un mandat puis Monica a continué seule la direction pour un second mandat.

Pour Monica et Fabien la première étape d’une collaboration est toujours une rencontre, avec en amont une connaissance du travail de l’autre, c’est-à-dire l’occasion de l’apprécier.

« Ça s’amorce sur une attraction, un désir. On ne part jamais de rien. Et c’est sur cette accroche de départ que la discussion est enclenchée. On communique sur ce qu’on a vu ou lu et ceci dans les deux sens. »

Le contrat est souvent ce qui arrive en dernier, mais oui il y a ici toujours un contrat, même lorsqu’il n’y a pas d’argent en jeu, parce que c’est tout simplement nécessaire au regard des assurances. Dans le cas de coproduction, le contrat peut intervenir en amont, en lien avec les différents partenaires. À l’occasion d’une résidence le contrat intervient quand la collaboration est déjà en route.

Ici ce qu’on appelle le contrat c’est ce morceau de langage juridique qui vient sceller une collaboration et ses conditions, avec assez peu d’occasions d’être personnel, parce que cela nécessite la validation d’une tierce personne. Mais souvent des parties d’un contrat type sont laissées vides parce que sujettes à discussion avec les artistes selon le projet.

Une méthode d’accueil

Parallèlement la Balsa a mis en place d’autres éléments et documents, comme le livret d’accueil qui reprend les règles de vie au sein de la Balsa, toute la vie pratique du théâtre et qui s’étend hors les murs pour une appropriation du quartier. Le « déjeuner d’accueil » est aussi l’occasion de rencontrer l’ensemble de l’équipe (directeur technique, communication, administration).

Les règles de fonctionnement se font au fur et à mesure avec chaque membre de l’équipe et les artistes accueillis et ceci peut être très spécifique, par exemple de décider avec une équipe de se voir une heure tous les jeudis pour concentrer les questions à un endroit. Et ça n’est pas décrit.

« Ce qui est important c’est de rapidement communiquer sur les ressources et expliquer qu’elles sont limitées. Voilà ce qu’on peut faire et voilà ce qu’on ne peut pas faire. » Et puis il y a le temps en dehors, tout ce qui n’est pas purement professionnel mais par exemple le fait d’avoir un lieu de vie, avec une vrai cuisine accessible à tout le monde, un endroit où se retrouver pour manger, cela participe aussi à l’énergie mise en commun.

Monica explique que ça devient un peu compliqué parfois sur le code moral. « C’est tout le problème des mots. » Les malentendus naissent sur la question des espaces à franchir et à ne pas franchir. Il y a à la Balsa beaucoup d’espaces avec des statuts différents (les loges, les bureaux, les scènes, la cuisine, etc). La question de la propreté, par exemple, est difficile à baliser. Il est parfois compliqué d’organiser la distribution de l’espace ou répondre à des besoins spécifiques et cela peut créer des tensions. « Ce ne sont pas des choses prévues contractuellement, on ne peut pas aller jusque là. S’adapter tout le temps demande beaucoup de souplesse et donc on s’amuse beaucoup mais ce n’est pas traduisible dans les contrats alors que oui, on pourrait y mettre plus. »

Quelques anecdotes de collaboration en tant que comédienne?

« La position d’interprète est difficile parce qu’elle implique de se mettre au service de quelqu’un. Dès le départ il y a quelque chose de biaisé. Après plusieurs déconvenues, j’ai vraiment mis de côté cette pratique. Je sais que c’est possible et que certaines personnes arrivent parfaitement à se mettre au service sans s’oublier ou en s’oubliant jusqu’à un certain point, comme si elles faisaient semblant de s’oublier disons. Parfois juste la description d’un rôle me bloquait et la mise au service dès le casting, uhh. »

Anecdotes de collaboration au sein de Balsamine

Les points sensibles avec une compagnie sont la communication et le droit d’auteur.

La communication parce que c’est leur projet et qu’ils veulent en parler à leur manière. Sur chacun des aspects, textuels, visuels, il faut discuter, négocier, par exemple chaque ligne du dossier de presse. « C’est le vivant. On est dans le vivant et dans l’émotionnel. On a des clashs de communication mais qui ne sont pas toujours compréhensibles. Concernant le droit d’auteur, on a déjà eu des cas où tout ce qui était produit (photos, dessins) ne pouvait pas être publié. Ce qui est très problématique pour la communication. » Et puis il y a les humeurs, des gens qui ne sont pas respectueux et qui pensent peut-être la même chose vis-à-vis de l’équipe. Les porteurs de projets passent parfois beaucoup d’heures sur place et donc ça peut devenir intense.

Des collaboration(s) Balsa et designers graphiques

À l’arrivée de Monica et Fabien à la Balsamine, il y avait une graphiste qui travaillait pour le théâtre depuis un certain nombre d’années et à la commande. Mais pour Monica et Fabien, leur envie de travailler avec d'autres graphistes était déjà claire et une rencontre était prévue. Ce qui a été dur pour la graphiste encore en activité sur cette saison en cours, était de comprendre qu’elle n’a pas eu de chance. C’est l’injustice qui est liée au désir de la rencontre dont on parlait plus haut. « Mais c’est juste aussi parce que la rencontre a besoin de cette énergie naturelle de départ. »

À l’occasion du projet Brussels Dance, Monica participe à un autre type de rencontre avec des graphistes. L’appel à projets rassemble une vingtaine de directions en charge du choix. « On reçoit des propositions graphiques très contrastées mais parfois vides. J’ai préféré ne pas prendre part au choix final. » Dans le cadre de l’appel à identité pour la FEAS (chambre des employeurs), même principe. « Ce que nous avons reçu ce sont trois propositions sans explication avec peu de portée et où personne ne cherche à comprendre plus. On fonctionne simplement au coup de cœur. Donc là, c’est clair, une relation comme ça n’est pas intéressante. Cette idée de commande à chaque endroit ne fonctionne pas. »